« L’épopée de Gilgamesh, le grand homme qui ne voulait pas mourir », chronique

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Présentation :

Vieille de quelque trente-cinq siècles et de loin antérieure à l’Iliade et au Mahâbhârata, l’épopée de gilgameš est la première œuvre littéraire connue à qui son ampleur, sa force, son souffle, sa hauteur de vision et de ton, l’éminent et l’universel de son propos aient valu, dans tout le proche-orient ancien, une célébrité millénaire et, dans notre jugement à nous, le titre d' »épopée ».
Elle conte l’histoire d’une grande amitié, source de surhumaines réussites, mais qui, tragiquement amputée par la mort, jette le survivant, le grand roi Gilgameš, dans une recherche désespérée, mais vaine, du moyen d’échapper au trépas.
Sur ses tablettes d’argile, depuis qu’au propre berceau de l’assyriologie, voici moins de cent cinquante ans, on en avait retrouvé les premiers lambeaux, le texte de cette composition fascinante n’a cessé, d’année en année, de se compléter de trouvailles nouvelles, et de se mieux entendre, replanté dans son dense et profond humus culturel natif.
Il fallait qu’un assyriologue (Jean Bottero), vieilli dans son métier, en mît au net la teneur la plus complète possible ; en revît la traduction, à la hauteur de son lyrisme auguste ; en expliquât, d’un mot, mais clairement, les exotismes, les silences et les subtilités, livrant ainsi au public de langue française démuni une édition à jour pour lui révéler au mieux de ce chef-d’œuvre admirable et presque secret.
Son travail n’ouvre pas seulement une grand-porte dans les puissants remparts qui défendent l’altière civilisation mésopotamienne, notre plus vieille aïeule ; il permettra aussi d’y retrouver, dans un discours et un imaginaire pourtant bien loin des nôtres, deux ou trois grandes valeurs universelles de notre condition humaine, qui comptent toujours à nos yeux : le prix de l’amitié, même si nous la savons périssable, comme tout, ici-bas ; et le sens de la vie, même si elle ne nous est accordée que pour se trouver, elle aussi, trop vite effacée par la mort.

** À la découverte de Gilgamesh, l’homme qui ne voulait pas mourir**

Le premier grand récit de l’humanité, et de loin puisqu’il date dans ses partie les plus ancienne de 35 siècles (!), soit bien avant les épopées d’Homère comme l’Odyssée, est centré autour de l’amitié (une thématique à remarquer pour ce premier grand récit) entre un roi Gilgamesh et son ami Enkidu qui vivront périple et aventures divines, notamment à cause de l’hostilité de la déesse Ishtar.
Enfin les dieux condamnent Enkidu à mort. Et Gilgamesh, profondément affligé par cette perte, entreprend une quête d’immortalité. Bien souvent quand nous nous émouvons d’une mort, ce n’est pas seulement vis-à-vis de la personne mais aussi parce qu’elle nous met en face de notre propre finitude. Et il est significatif que l’un des principaux thèmes du premier récit connu soit une quête d’immortalité.
On remarque déjà que le premier romancier de l’humanité (car il s’agit d’un roman d’aventure initiatique sur fond mythologique) est inconnu voire, peut-on imaginer, volontairement anonyme ce qui de mon point de vue est assez poétique et source de réflexions. C’est le roman de la toute première quête aussi. Ou tout simplement à l’époque, ça paraissait peut-être incongru de vouloir laisser son nom. Tout comme d’ailleurs, les constructeurs des cathédrales n’ont jamais tenu à signer leurs chefs d’oeuvre. Bref je m’égare mais on est bien loin de la mentalité moderne, dont la mienne. En effet, écrire est aussi pour moi une manière de me perpétuer au-delà de ma mort.
Je souligne que la traduction par Jean Bottero rend l’approche du texte tout à fait facile et la lecture agréable, presque rapide. Le lire c’est voyager dans l’esprit des origines de l’humanité. Je trouve ça fascinant.

Après avoir lu entièrement ce premier grand roman de l’humanité, je remarque des aspirations de l’homme qui n’ont toujours pas changer : la soif de rentrer en relation (au travers de l’amitié et du dialogue avec les dieux) et le désir d’immortalité en contraste avec la conscience de la souffrance humaine.
A contrario, nulle soif de puissance chez Gilgamesh. (tout ce qui est écrit en italique est de mon fait)

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A travers ce livre nous découvrons aussi la mythologie mésopotamienne.

** Autour de Gilgamesh, le démon Humbaba**
 
Dans la mythologie mésopotamienne, Humbaba (Huwawa en sumérien) est le démon gardien de la forêt des résineux où vivent les dieux. Cette charge lui a été confiée par le dieu du vent et de la grande montagne Enlil. Son aspect effrayant et des armes surnaturelles, sept fulgurances dans la version ancienne de l’Épopée de Gilgamesh ou sept manteaux magiques dans la version ninivite, permettaient de faire fuir les autres démons.
Durant l’un des épisodes de l’Épopée de Gilgamesh, Gilgamesh accompagné d’Enkidu s’aventure dans la forêt des Cèdres pour tuer Humbaba. Alerté par leur présence, Humbaba se présente à eux. Il semble connaître ses deux assaillants et tente de les dissuader. Enkidu prend peur mais Gilgamesh l’affronte. Ils sont aidés dans leur combat par le dieu Shamash. Vaincu, Humbaba implore Gilgamesh de lui laisser la vie sauve, mais Enkidu le presse de l’achever, ce que fait Gilgamesh, juste après qu’Humbaba ait le temps de marmonner un dernier sort. Les deux vainqueurs retournent à Nippur avec le plus grand cèdre de la forêt et la tête d’Humbaba3.
La mort de Humbaba et celle du taureau céleste envoyé par Ishtar auront pour conséquence d’attirer la colère des dieux sur les deux
héros4, particulièrement sur Enkidu : subitement frappé de langueur, il meurt peu après le retour à Uruk.
(source : wikipedia)Humbaba_gilgamesh
 
 
** En fait l’épopée de Gilgamesh, l’un des tout premiers récits de l’humanité, c’est « hot » ! **
Ici, vers – 1500 av JC au bas mot, Enkidu le futur meilleur ami de Gilgamesh fait l’amour (enfin le terme plus adapté serait « b… « ) à une courtisane, ce qui lui donne (mais pourquoi ??) l’intelligence.
Peut-être que la Courtisane est en fait Ishtar dont on parle un peu plus bas. En tous cas, ça se lit bien 🙂 On note au passage l’inexistence du moindre tabou puisque la description va jusqu’à évoquer le sexe.
 
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Un sommeil préparé avec un bon rituel protecteur permet d’avoir de bons rêves qui permettent de mettre en contact le rêveur et le divin.

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On s aperçoit que l interprétation des rêves tenait déjà une grande place dans la civilisation. On retrouve ça dans l’Anabase, l’Ancien Testament, l’Odyssée, l’Ennéide, le cycle des romans de la table ronde, La divine comédie etc. C’est vieux comme le monde.

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En fait je me rends compte que dès les temps très anciens, on pourrait dire que, en termes modernes et psychologiques, la vie du subconscient est très importante en tant que message venant des dieux notamment quand il s agit des rêves. Il y a au moins 4 rêves prémonitoires et leur interprétation est « pointue » dans le récit. Ça fait partie intégrante de leur pensée et ils sont très importants, cruciaux.
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** Gilgamesh (récit d’il y a 3000 ans), blessé par la mort de son ami Enkidu veut savoir comment devenir immortel auprès de Uta-Napishtim, un héros devenu immortel, faut pas empêcher les dieux de dormir, bonnes gens… **
Les dieux, particulièrement Enlil, en colère contre l’humanité, qui faisait trop de bruit la nuit l’empêchant de dormir, décident de les supprimer dans une gigantesque inondation.
Le dieu Enki, tenu par le secret, utilisa le subterfuge de confier aux roseaux le projet des dieux afin d’avertir Utanapishtim. Il le chargea d’amener sa femme, sa famille et ses proches avec les artisans de son village, ses bébés et ses céréales ainsi que les animaux de la terre. L’inondation atteindrait tous les animaux et les humains qui n’étaient pas sur le navire, un concept similaire a l’histoire biblique de l’arche de Noé. (le récit de Gilgamesh est antérieur à celui écrit dans l’ancien testament)
Après douze jours sur l’eau, Utanapishtim ouvrit la trappe de son navire pour regarder autour et voir les pentes du mont Nisir, où il reposa son bateau pendant sept jours. Le septième jour, il envoya une colombe pour voir si l’eau avait reculé, et la colombe ne put trouver que de l’eau et revint. Puis il envoya une hirondelle, et comme précédemment, elle revint sans avoir rien trouvé. Enfin, Utanapishtim envoya un corbeau, et le corbeau vit que les eaux avaient reculé, alors il circula autour, mais il ne revint pas. Utanapishtim libéra ensuite tous les animaux libres et fit un sacrifice aux dieux.
Les dieux vinrent, et parce qu’il avait conservé la semence de l’homme tout en restant fidèle et confiant en ses dieux, Utanapishtim et sa femme reçurent l’immortalité, surtout grâce à Enki.
Le nom sumérien d’Enlil est constitué des termes « Seigneur » (en) et « Air »/« Vent »/« Souffle » (líl). Si on suit cette étymologie, Enlil serait à l’origine une divinité liée au vent, peut-être au vent du printemps qui assure le retour de la végétation. De là découlerait aussi l’aspect colérique, impétueux et parfois sombre qu’a parfois ce dieu dans la mythologie1. Le terme LÍL peut en fait être compris comme l’atmosphère, espace entre le ciel et la surface de la terre2, suivant la cosmologie sumérienne qui attribue le Ciel (an) comme résidence au dieu Anu, le monde inférieur (ki, plus précisément l’Apsû, monde des eaux souterraines) comme résidence du dieu Enki, laissant donc ce qui est entre les deux au dieu Enlil, c’est-à-dire l’espace des humains (ce qui serait alors lié à sa fonction de divinité suprême).
A noter, la parenté évidente de la représentation d’Enlil avec le symbole de la religion Zoroastrienne.
 
** autour de Gilgamesh, le dieu soleil mésopotamien Amash **
Shamash est le nom akkadien du dieu-Soleil dans le panthéon mésopotamien. Il correspond au sumérien Utu. Il occupe une petite position secondaire dans la hiérarchie divine par rapport au dieu Lune Sîn, considéré comme son père, et a un rôle effacé dans la mythologie, qui contraste avec la grande popularité dont il a bénéficié auprès des anciens Mésopotamiens comme l’atteste le fait que nombre d’entre eux ont porté un nom faisant référence à ce dieu.
Shamash était vu comme le garant de la justice. Tout comme le soleil disperse les ténèbres, il expose en pleine lumière le mal et l’injustice. Dans la mentalité mésopotamienne, cette fonction de justice a été mise en relation avec celle de guérison, vue comme la libération de l’emprise de maux injustement subis, ou encore avec la divination, Shamash éclairant les messages divins qui apparaissent dans les entrailles d’ovins, dans les rituels d’hépatoscopie très répandus en Mésopotamie ancienne. Cela lui vaut d’être célébré dans de nombreux hymnes et prières qui figurent parmi les plus belles pièces de la littérature mésopotamienne.
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A propos Jean-Baptiste Messier

J'ai toujours été guidé par l’idée de produire des textes originaux, provocateurs voire transgressifs. La littérature érotique est mon domaine de prédilection même si j'aime parfois composer des cocktails avec le fantastique, la SF ou la fantasy. J'écris aussi des chroniques sur des livres très divers et évoque parfois des sujets assez polémiques ou spirituels. A découvrir. ;)
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