Bogart
Bogart avait convoqué Aline au
Q.G. de la cité des justes, là où résidait celui qui détenait toutes les clés
des énigmes quelles qu’elles soient. Némésis. Ainsi se nommait l’ordinateur
doué d’une intelligence artificielle. Aline arriva. Elle était vêtue d’une
longue robe verte fendue sur le côté qui soulignait la couleur de ses yeux.
« Bonjour.
–
Bonjour. Cet écran que vous avez
en face de vous, ces loupiotes qui clignotent, sont le signe visible d’une
intelligence énorme, omnisciente, qui se nomme Némésis, ce qui n’est pas très
original.
Le nom de
notre meurtrier est Roméo qui a été identifié grâce à ses empreintes digitales,
laissées exprès à mon avis. Le but, maintenant, est de découvrir dans quel
endroit il se terre. Nous utilisons une procédure exceptionnelle. Nous ne
recourrons à Némésis que dans les cas éminemment graves. D’ordinaire, nous
poursuivons les criminels par nos propres moyens. Nous avons jugé que ce cas
méritait d’être traité rapidement, très rapidement.
–
Comment pouvez vous faire confiance
à une machine ?
–
C’est beaucoup plus qu’une
machine, presqu’une nouvelle forme de vie… je pense qu’il n’y a pas de noms
pour la qualifier. Némésis possède toutes les données génétiques et
biographiques de Roméo. A partir de ces éléments, elle extrapole les décisions
qu’a prises Roméo. C’était un « Dichter », un poète.
–
Enfin, il s’était proclamé poète,
comme d’autres se proclament philosophes. En fait son style était suffisamment
bon pour combler les gens friands d’histoire à l’eau de rose.
–
Némésis ne peut elle se
tromper ?
–
Impossible. Grâce aux multiples
recoupements qu’elle opère entre les données génétiques et biographiques, elle
détermine le psychisme de l’individu, en quelque sorte elle le « chosifie ».
Elle codifie
son âme, son esprit, qui devient un simple mécanisme aisément prévisible… pour
elle.
Seuls les tous
jeunes enfants à la rigueur…
–
c’est horrible…
–
sans doute. Admirable en tous
cas… »
Sur l’écran
noir s’inscrivit en lettres blanches, le message suivant :
« Roméo
s’est réfugié dans la cité des miséreux, dans une secte pour attendre sa mort.
« Bien,
ce sera une courte investigation qui durera au plus quelques jours. Voilà, je
désirais vous mettre au courant. »
Bogart, rentré
chez lui, se prépara un rapide dîner et écouta le velvet underground. Après il
vidéophona à Aline :
« Bonsoir
Aline.
–
Bonsoir », répondit-elle d’un
ton surpris et interrogatif.
–
Dites, je pensais… vous seriez
intéressé pour venir avec moi demain ? Cunégonde n’était pas exactement
une amie, mais… »
Aline
visiblement, essayait de sonder ses intentions et demanda :
« vous
voulez dire… aller à la cité des miséreux… pour éliminer Roméo ?
–
hé bien, oui.
–
Pourquoi avoir pensé à moi ?
–
… sans doute que j’ai besoin de
compagnie, c’est une bonne raison, non ? »
Aline ne
semblait pas convaincue par la justesse de la raison invoquée, cependant elle
accepta.