Histoire de la naissance de l’écriture

Hier j assistais à une conférence URCI sur la naissance de l écriture donnée par Marie-Agnès Domin, conférencière de l’URCI, section Traditions et Philosophies. C est assez fascinant de concevoir comment l’esprit humain en est venu à concevoir l’écriture. Il est certain que sur le plan de l évolution, c est un tournant aussi important que la maîtrise du feu. C’est d’autant plus intéressant de s’intéresser à la naissance de l’écriture qu’on est lecteur affamé ou… écrivain.:)

Je donne ici un petit compte rendu entrelacé de mes propres réflexions et diverses digressions.

C est seulement, il y a 4 000 ans av JC que les premières protoecritures apparaissent et notre alphabet (grec) date seulement du 5ieme siècle av JC. On remarque la floraison des philosophes à cette époque. On fait remonter à Sumer, des traces très anciennes d’écriture à Ur notamment, dans le bassin du tigre et de l’Euphrate.

Aussi troublant, les hiéroglyphes Égyptiens (photo ci-dessus) du scribe assis du Louvres semblent avoir été conçus dès le départ avec leur forme achevée vers 1500 ans avant notre ère pour connaître des évolutions vers des formes plus simples (le démotique notamment utilisé sur la pierre de rosette).

écriture démotique (7ième siècle av JC) :

Le patron des scribes est Thot (digression, source wikipedia) :

Inventeur de l’écriture et du langage, il est la « langue d’Atoum » et le scribe des dieux. Incarnation de l’intelligence et de la parole, il connaît les formules magiques auxquelles les dieux ne peuvent résister. Selon la légende, celui qui était capable de déchiffrer les formules magiques du Livre de Thot pouvait espérer surpasser même les dieux.

Statue colossale d’un babouin – animal sacré du dieu Thot – Règne d’Amenhotep III – Hermopolis

Le respect que Thot inspire lui vient de son savoir illimité. Toutes les sciences sont en sa possession : Il connaît tout et comprend tout. En tant que détenteur de la connaissance, il est chargé de la diffuser. C’est pourquoi il a inventé l’écriture. Les anciens égyptiens pensaient que le savoir et la connaissance leur avaient été transmis par des livres et des écrits que Thot avait volontairement abandonnés dans des temples. Cependant, la conscience aiguë qu’il a de sa supériorité intellectuelle le rend ennuyeux, présomptueux et pompeux. Il aime les discours soignés, les formules alambiquées et affecte les tons empruntés. Souvent il agace les autres divinités qui ne manquent pas de le lui faire remarquer. Ses compétences s’étendent aussi au domaine des mathématiques dans lequel il excelle. C’est lui qui a fixé les limites des nomes et du Double-Pays. Il est l’auteur des plans des sanctuaires des dieux car lui seul sait tracer des plans et orienter les bâtiments. Toutes les sciences sont sous son contrôle et réclament obligatoirement sa protection2.

Il préside à l’audition des morts au tribunal d’Osiris, et c’est Anubis qui pèse et juge les âmes en les comparant au poids d’une plume (symbole de Maât et de la justice), afin de décider si le défunt, représenté par son  (qui, plus que l’âme, est à la fois le double spirituel et la figuration du mort ainsi identifié par Osiris), doit être condamné (le Kâ étant alors dévoré par Ammout, « la Grande dévoreuse » qui attend aux pieds de la balance) ou jugée digne d’accéder aux Champs d’Ialou, sorte de paradis éternel dans lequel règne l’ordre imperturbable. Maât correspondrait plus ou moins à notre conception de Justice, à ceci près qu’elle n’est pas qu’un rapport harmonieux relatif au juste et à l’injuste, mais principe d’ordre universel.

Un passage du livre de la vache et du ciel explique que Thot est choisi par Rê comme vizir alors que celui-ci s’apprête à quitter le monde des hommes. Thot est ainsi le greffier divin qui possède les mêmes compétences que le greffier de l’administration pharaonique.

Lors de son combat avec SethHorus perdit son œil, mais le retrouva par la suite grâce à Thot. Appelé « Oudjat », cet œil représente la victoire de l’ordre (légitime, Horus étant l’héritier du défunt Osiris) sur le chaos (Seth, qui perturbe l’ordre dynastique, et par conséquent l’ordre du monde). Porté sous forme d’amulette, il était censé écarter le mauvais œil ; on le place notamment sur la proue des navires, pour échapper aux dangereux hippopotames.

L’écriture a alors une valeur sacrée, magique aussi. On retrouve cette idée à la naissance de l’écriture hébraïque ou les idéogrammes chinois qui eux ont une forme qui traversent les âges depuis leur naissance il y a 4000 ans. Pour souligner l importance de l écriture sur le plan de l histoire de l’évolution de la conscience humaine et finalement de l homo sapiens se sachant penser (homo sapiens sapiens), une légende chinoise raconte que les dieux se mirent en colère quand les hommes créèrent l écriture. Ici une photo du livre des mutations chinois, texte à la sagesse abyssale :

 

On peut rapprocher ça de l’arbre de la connaissance de Eve et Adam.

La Kabbale insiste sur la notion du Nom de Dieu et des lettres qui composent le tétragramme sacré (ici écriture Le Tétragramme en phénicien, en araméenancien et en hébreu carré.) :

Dans le domaine de l’écriture sacrée, on peut penser aussi au sanscrit et notamment la lettre « OM » (pas le club de foot hein) :

 

Omaum, (sanskrit ; en devanagari : ॐ) est une syllabe sanskrite que l’on retrouve dans plusieurs religions : l’hindouisme et ses yogas, le bouddhisme, le jaïnisme, le sikhisme, et le brahmanisme. On la nomme aussi udgitha ou pranava mantra (« mantra primordial », le mot prāṇa signifiant également « vibration vitale »). D’un point de vue hindouiste, cette syllabe représente le son originelprimordial, à partir duquel l’Univers se serait structuré. Elle est décrite ou mentionnée dans certaines upaniṣadsnotamment la Chāndogya Upaniṣad1. (source wikipedia)

Enfin la conférencière termine par de très jolies citations  du papyrus Papyrus Chester Beatty IV (traduit notamment par Christiane Desroches Noblecourt (la célèbre egyptologue)) qui dit que les livres sont un moyen de laisser une trace par delà la mort. C est en effet quelque chose qui me guide quand j écris. Et parfois, je me dis qu’après ma mort, mes écrits me survivront sur internet, des gens cliqueront sur des liens et tomberont sur « moi » de manière aléatoire et ce, jusqu’à une date indéfinie… C’est magique, non ?

Extrait du livre « La fascinante histoire de l’écriture » de Marie-Agnès Domin :

Voici d’autres extraits du papyrus que j’ai trouvés :

Si vous ne faites que cela, devenez un expert en écriture:
ces écrivains de la connaissance des événements postérieurs aux dieux,
ceux qui ont prédit l’avenir,
leurs noms sont devenus figés pour l’éternité,
bien qu’ils soient partis, ils ont terminé leur vie,
et tous leurs parents sont oubliés.

Ils ne se sont pas fait une chapelle en cuivre,
ni une stèle en fer du ciel.
Ils n’ont pas réussi à laisser les héritiers,
de leurs enfants, prononcer leurs noms,
mais ils ont acquis des héritiers grâce aux écrits,
aux enseignements de ceux-ci.

On leur donne le livre en tant que prêtre rituel,
Le tableau d’écriture en tant que fils aimant.
Les enseignements sont leurs chapelles,
les écrivains pressent leur enfant
et le bloc de pierre de la femme.
De grand en petit, (tous) sont donnés comme ses enfants,
pour l’écrivain, il est leur chef.

Les portes de leurs chapelles sont défaites,
leurs ka-prêtres sont partis.
Leurs pierres tombales sont maculées de boue,
leurs tombeaux sont oubliés,
mais leurs noms sont lus sur leurs rouleaux,
écrits quand ils étaient jeunes.
On se souvient de les faire, aux limites de l’éternité.

Soyez un écrivain – mettez-le dans votre cœur ,
et votre nom est créé par le même.
Les parchemins sont plus utiles que les pierres tombales,
que de construire un boîtier solide.
Ils agissent comme des chapelles et des chambres,
par le désir de celui qui prononce leur nom.
Il est certain que dans le cimetière, on utilise surtout
un nom dans la bouche des hommes.

Un homme est mort, son cadavre est dans la terre:
quand toute sa famille est étendue dans la terre,
c’est une écriture qui lui permet de se souvenir,
dans la bouche du récitant de la formule.
Les parchemins sont plus utiles qu’une maison construite,
que les chapelles à l’ouest,
ils sont plus parfaits que les tours de palais,
plus durables qu’un monument dans un temple.

Ceux qui ont su prédire l’avenir ,
ce qui est sorti de leur bouche a eu lieu
et peut être trouvé dans (leur) phrasé.
Ils ont la progéniture des autres
comme héritiers, comme si c’était leurs propres enfants.
Ils ont caché leurs pouvoirs dans tout le pays,
pour être lus dans (leurs) enseignements.
Ils sont partis, leurs noms peuvent être oubliés,
mais l’écriture permet de se souvenir d’eux.

Quelques infos sur ce papyrus (c’est fascinant de penser à ces… penseurs d’il y a 3200 ans !) :

L’immortalité de l’écrivain (1200 avant JC)

L’un des groupes de manuscrits Ramesside de Deir el-Médine porte le plus ancien passage égyptien encore en vie, faisant l’éloge de l’écriture et des écrivains, en tant que moyen le plus sûr d’assurer l’immortalité. Cela se produit dans une composition plus longue, incitant un apprenti à persévérer dans l’écriture, dans la tradition de la Satire des métiers.. Selon ce passage, alors que les chapelles d’offrande et les familles ne peuvent pas survivre mille ans, un écrivain est maintenu en vie par ses écrits. Ce n’est pas exactement la même chose que l’immortalité sans nom du nom, où l’existence immortelle consiste en la mémoire d’une personne parmi d’autres. L’ancienne croyance égyptienne en l’immortalité incluait la croyance que les morts avaient besoin de nourriture et de boisson, ce qui était fourni par la récitation de la «formule d’offrande»: le passage ci-dessous révèle l’inquiétude que des monuments et des familles puissent être détruits ou présent dans les générations futures et que, par conséquent, les individus ont besoin d’un public plus large pour prononcer la formule d’offrande de leur nom.

source : https://www.ucl.ac.uk/museums-static/digitalegypt/literature/authorspchb.html

lien vers la conférence URCI : https://www.rose-croix-est.fr/events/la-fascinante-histoire-de-lecriture-lart-de-dessiner-la-parole/

video mantra OM 🙂 :

Et pour terminer, je vous propose un texte que j’ai écrit il y a 7 ans sur l’alchimie de l’écriture (lecture et téléchargement gratuits) où je développe l’idée que l’écriture cristallise l’esprit :
L’écriture, un art alchimique

A propos Jean-Baptiste Messier

J'ai toujours été guidé par l’idée de produire des textes originaux, provocateurs voire transgressifs. La littérature érotique est mon domaine de prédilection même si j'aime parfois composer des cocktails avec le fantastique, la SF ou la fantasy. J'écris aussi des chroniques sur des livres très divers et évoque parfois des sujets assez polémiques ou spirituels. A découvrir. ;)
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