Nécessité de l’État, subterfuge du riche, inégalité… Rousseau(3)

III Nécessité de l’État, subterfuge du riche, inégalité

Les hommes sous le joug de leurs passions, « des usurpations des riches et des brigandages des pauvres » vont s’entre-déchirer et s’acheminer vers l’état de guerre décrit par Hobbes. Mais à la différence de Hobbes, Rousseau se sert de l’état de nature pour mieux pouvoir critiquer la société puisque l’homme naturel est bon, tandis que chez Hobbes l’état de nature, la guerre civile, joue comme un repoussoir et légitime la société et la formation de l’État destiné à garantir sa sécurité. La logique est inverse. Quoiqu’il en soit, la source de légitimité de tout gouvernement est un contrat passé entre le peuple et le gouvernement. Pourtant le peuple est abusé car sous couvert de lui assurer sa liberté, l’État a pour fonction essentielle de garantir la propriété.

 

 

Ainsi à la question, comment l’homme peut-il accepter cette situation d’inégalité ou mieux comment ceux qui sont en haut ont-ils pu faire accepter cette situation à ceux d’en bas ; Rousseau répond que le fonctionnement de la société est basé sur un subterfuge. Le riche ou l’élite, ceux qui tirent profit de cet état des choses, sous prétexte d’assurer la sécurité, la justice, et la liberté de chacun, va être le moteur pour instaurer une autorité, l’Etat, qui fera respecter le droit de propriété, entérinera et légitimera les différences de richesse, et donc d’inégalité.

 

Mais de quelle inégalité parle-t-on ?

Rousseau distingue inégalité naturelle et morale. « Je conçois (…) deux sortes d’inégalités : l’une naturelle (…), l’autre morale ou politique parce qu’elle dépend d’une sorte de convention et qu’elle est établie, ou du moins autorisée par les hommes. »

Tout d’abord, il faut rappeler que dans l’état de nature, il n’y a pas d’inégalité car l’homme ne vit pas en communauté. Rousseau entend par inégalité naturelle les différences de capacité physique, morale, intellectuelle attribuées à la naissance de chaque homme.

L’inégalité morale ou politique résulte de conventions et confère pouvoir et richesses à certains qui pourront alors user d’autorité, commander en vertu de ces conventions à d’autres. C’est donc le droit positif tel qu’on le connaît qui va légitimer la hiérarchie sociale. Ce droit positif va à l’encontre du droit naturel qui est fondé sur la liberté. CQFD.

 

Pour Rousseau, chercher à justifier l’inégalité politique par l’inégalité naturelle serait digne d’une mentalité d’esclave. Pour autant, il admet une certaine inégalité politique si celle-ci est proportionnelle à l’inégalité naturelle. De plus l’inégalité politique n’est pas fatale puisqu’elle résulte de conventions.

Le développement croissant des inégalités connaît trois phases.

En premier lieu l’inégalité du riche et du pauvre due à l’instauration de la propriété. Ensuite la création de l’État va accroître les inégalités de pouvoir entre les différents échelons de la société civile. Plus je grimpe dans la hiérarchie sociale, plus je dispose de pouvoir et inversement. Les hommes acceptent d’être dominés dans l’espoir de pouvoir dominer à leur tour, ce qui est une chaîne de servitude.

Enfin l’étape ultime, le despotisme, est celle où le sommet a su concentrer tout le pouvoir et où règne l’arbitraire du despote. La liberté la plus absolue est remontée vers le sommet tandis que l’égalité la plus absolue, l’esclavage, est descendue vers la base.

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A propos Jean-Baptiste Messier

J'ai toujours été guidé par l’idée de produire des textes originaux, provocateurs voire transgressifs. La littérature érotique est mon domaine de prédilection même si j'aime parfois composer des cocktails avec le fantastique, la SF ou la fantasy. J'écris aussi des chroniques sur des livres très divers et évoque parfois des sujets assez polémiques ou spirituels. A découvrir. ;)
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7 commentaires pour Nécessité de l’État, subterfuge du riche, inégalité… Rousseau(3)

  1. Sayuri Fleur d'Orient dit :

    billet passionant, surtout que j’adore la philospohie, cependant je m’interroge sur Rousseau car c’était un grand philosphe de son temps hors on sait qu’il était aussi très proche de la Royauté, se peut-il que son jugement sur la sociétée a-t-il pu être altérée par la classe sociale dominante je le crois. Ce qui m’amène à ceci les trois mots fondement de notre belle France LIBERTE EGALITE FRATERNITE.

    Tu viens de m’éclairer en partie sur l’un de ces trois mots et la vision qu’en avait les français au XVIIIème siècle, mais est-ce encore totalement valable aujourd’hui ? La Fraternité et l’entraide ont pratiquement disparu de notre culture et nos libertés individuelles disparaissent au fur et à mesures, pourtant si chèrement payées lors de la Révolution française, alors parfois j’en viens à me demander si un jour nous Français ne referont pas une Révolution pour à nouveau conquérir nos acquis sociaux et politiques une nouvelle fois.

    Mon sentiment sur ton billet est simple couront nous directement vers une France « américanisée » ou chacun devra se débrouiller seul dans un sytème encore plus capitaliste qu’aujourd’hui, ou verra t-on devenir notre pays devenir un pays en voie de développement à l’instar de nouveaux pays riches…..

    Toute une réflexion personnelle sur notre sociétée actuelle, dont je suis observatrice aujourd’hui 🙂 Mais dont j’essaie de comprendre le fonctionnement et les intérêts commerciaux, poltiques et financier, tout en essayant de rester neutre, pas facile, mais je m’accroche 🙂

    Douce soirée Jean-Baptiste

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    • « Mon sentiment sur ton billet est simple couront nous directement vers une France « américanisée » ou chacun devra se débrouiller seul dans un sytème encore plus capitaliste qu’aujourd’hui »
      humm un pays capitaliste où nous avons la sécurité sociale et les allocations chômages, je t’assure c’est pas vraiment ultralibéral notre système. 😉

      « ou verra t-on devenir notre pays devenir un pays en voie de développement à l’instar de nouveaux pays riches….. »
      ça c’est une réflexion intéressante. effectivement il y a les inégalités entre nations. et des pays comme la Chine, la Corée se sont développés. Doit-on aussi rappeler le formidable développement du Japon après la seconde guerre mondiale ? on doit se réjouir que des millions de personnes comme en Chine sortent de la pauvreté mais il est vrai sans faire la langue de bois que sans doute ce développement fragilise notre système économique et sociale car c’est une concurrence rude même si en fait ils ne sont pas vraiment sur les mêmes créneaux que nous. Mais l’adaptation de notre système économique ne se fait pas sans difficultés. Rien n’est figé, tout bouge, il faut l’accepter.
      Mais de ma position, c’est assez facile à dire.

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  2. Drenagoram dit :

    Un Théme Brûlant d’Actuelles Idées ,
    Comment se fait il qu’il n’y ait pas de Révoltes ?
    Quelle est le Berceau des Inégalités ,
    Si on sait les Bons Choeurs sans Louanges Véritables.
    Si on sait l’Origine être entachée de Fautes ,
    Il faut Croire que les Maux sont un Mal supportable ,
    Qui enchainent à ses Poings tous les Uns Féodés ,
    Pour un Manque à Gagner , un Savoir Honorable ,
    Quand le Roi n’est pas Juste , les Masques Viennent à Tomber.
    NéO~

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  3. PIERRE dit :

    JB
    TA PRESENTATION DONNE TERRIBLEMENT ENVIE DE REVISITER ROUSSEAU ET LA PHILOSOPHIE POLITIQUE
    D ORES ET DEJA UN RAPPROCHEMENT ME VIENT A L ESPRIT AVEC LE DISCOURS SUR LA CONDITION DES GRANDS DE PASCAL ET LA DISTINCTION QU IL FAIT ENTRE LES GRANDEURS D ETABLISSEMENT ET LES GRANDEURS NATURELLES DANS LE SECOND DISCOURS
    CE N EST LA QU UN RAPPROCHEMENT MAIS IL ME SEMBLE ASSEZ BIEN ILLUSTRER LA NOTION DE CONVENTION QUE TU EVOQUES POUR CE QUI RELEVE DES GRANDEURS D ETABLISSEMENTS
    BIEN A TOI ET AU PLAISIR DE TE LIRE

    ‘Il y a dans le monde deux sortes de grandeurs; car il y a des grandeurs d’établissement et des grandeurs naturelles. Les grandeurs d’établissement dépendent de la volonté des hommes, qui ont cru avec raison devoir honorer certains états et y attacher certains respects. Les dignités et la noblesse sont de ce genre. En un pays on honore les nobles, en l’autre les roturiers, en celui-ci les aînés, en cet autre les cadets. Pour quoi cela? Parce qu’il a plu aux hommes. La chose était indifférente avant l’établissement: après l’établissement elle devient juste, parce qu’il est injuste de la troubler’
    Les grandeurs naturelles sont celles qui sont indépendantes de la fantaisie des hommes, parce qu’elles consistent dans des qualités réelles et effectives de l’âme ou du corps, qui rendent l’une ou l’autre plus estimable, comme les sciences, la lumière de l’esprit, la vertu, la santé, la force.

    Nous devons quelque chose à l’une et à l’autre de ces grandeurs; mais comme elles sont d’une nature différente, nous leur devons aussi différents respects.’

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    • effectivement ça se rapproche beaucoup, mais la philo comme toute discipline s’inspire de ce qui a été fait avant et essaie d’apporter une pierre 😉 de nouveauté.

      J’admire Pascal en tant qu’homme complet et j’adore « les pensées » avec ces petites (par la taille) réflexions bien vivantes, intériorisées et incisives.

      Merci pour ce rapprochement enrichissant.

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  4. A mon retour de Chine, je présenterai dans le droit fil de ce commentaire, une réflexion sur la justice sociale (en travaillant notamment sur l’antinomie Rawls, Hayek….)

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