Y a t’il une antinomie entre le bushido et les mythes grecs ?

Voici une question qu’à posé Maître Smilodon, Hanshi, 8ième dan.

Mais avant d’aborder cette question tel un pirate agité, commençons par un hors d’oeuvre.

L’idéogramme du Zen (ou t’chan en chinois) signifie le leg du trône, pas celui des toilettes, mais de l’empereur. Le Zen, essentiellement, consiste à pratiquer et transmettre cett posture d’éveil, cette porte céleste qui est transmise sans interruption depuis l’éveil du Bouddha historique il y a 2500 ans. Pratiquer le Zen avec la bonne posture et l’attitude d’esprit correct, c’est s’inscrire dans cette transmission. Quelques soient nos imperfections supposées.

Voilà fin du hors d’oeuvre venons en à la salade piémontaise. j’aime bien raconter des salades. …. 🙂

Y a t’il une antinomie entre bushido et mythes grecs ?

en fait je pense qu’il y a des points communs et une différence
fondamentale. Tout d’abord fixons (un peu) les idées. Qu’est ce que le
bushido ? Le bushido c’est la voie du samouraï. bushido est composé de trois idéogrammes : bu, les arts martiaux ( comme dans bu jutsu) shi, le guerrier, do, la voie (comme dans dojo, lieu de la Voie). Selon Maître Deshimaru (Zen&arts martiaux) le bushido a
pour racine la fusion du shintoïsme qui se caractérise entre autre par
le culte rendu aux esprits et aux ancêtres et le bouddhisme qui se
caractérise par son culte du détachement. Maître Deshimaru souligne que la pratique à partir du corps et de l’inconscient (cerveau reptilien) est fondamentale.

Toujours selon Maître Deshimaru, le bushido s’appuie sur 7 principes :
– Gi :la décision juste dans l’équanimité, l’attitude juste, la vérité. Quand nous devons mourir, nous devons mourir.
-Yu : la bravoure teintée d’héroïsme
-Jin : l’amour universel, la bienveillance envers l’humanité.
– Rei : le comportement juste, point fondamental.
-Makoto : la sincérité totale.
– Melyo : l’honneur et la gloire.
– Chugi : la dévotion, la loyauté

Le bouddhisme toujours selon Maître Deshimaru aurait influencé le bushido sur 5 aspects :
– l’apaisement des sentiments
– l’obéissance tranquille face à l’inévitable
– la maîtrise de soi en présence de n’importe quel événement
– l’intimité plus grande avec l’idée de la mort qu’avec celle de la vie.
– la pure pauvreté

Sur
ce qui concerne l’importance de l’héroïsme et de la bravoure, on
retrouvera superficiellement au moins les mythes grecs, que ce soit
avec Ulysse, Thésée, Enée ou Hercule. Cependant je vois déjà une
différence dans l’attitude notamment vis à vis de la passion. Les héros
grecs sont des hommes de désir (H-Eros) passionnés. La passion n’est
elle pas à l’origine de l’Illiade ? Héraklès en plus d’être irascible
n’était il pas un grand amoureux ?
les argonautes n’avaient ils pas un grand désir, celui de la toison d’or (non ce n’est pas ce que vous pensez :)) ?
Nous
voyons que l’amour est du côté des fils d’Argos, qu’il est un fil
d’Ariane. En parlant de ça on peut remarquer que Thésée va abattre le
minotaure, horrible monstre au fond d’un dédale grâce au fil d’Ariane,
qui s’avère être son amoureuse. (je parle d’Ariane pas du fil :))
De même Ulysse à l’image de Pénélope au fond de son coeur. (en tous cas elle est comme un fanal)

L’amour
est du côté des HEros et l’amour, c’est la vie pour moi. tandis que la
mort (amor, âme-or) serait du côté du bushido…. par exemple de ce
point de vue la vie de Musashi est édifiante ou pas tant que ça….
ainsi nous le voyons refuser l’amour d’une belle japonaise et se
consacrer à sa voie comme si l’un était opposé à l’autre. Mais peut
être que la Voie est alors une manière de sublimer l’amour ?

Alors
que l’amour est vu comme un vecteur d’héroïsme côté grec, il est chassé
côté samouraï (du moins il me semble, j’attends la contradiction). cette tradition du fin’ Amor (troubadours, amour
courtois) court dans la tradition depuis les beaux yeux d’hélène
(l’Illiade) jusqu’au chevalier à la rose or la rose est une métaphore
bien connue pour désigner le sexe de la femme. on voit donc quel est
l’aimant de nos fils d’Eros, les héros.

D’une manière plus
secondaire, les héros grecs n’hésitent pas à employer la tromperie et
les ruses pour arriver leurs fins (cheval de Troie, Ulysse aux milles
ruses). De même ils sont bien souvent jaloux, colériques, impétueux et
ne sont pas du tout des modèles de détachement. Même les dieux de
l’Olympe sont loin d’être hiératiques, sont la proie de colère et de
mesquinerie et d’infidélité (pauvre Héra !)
non ce qui fait le héros
c’est sa passion à surmonter les obstacles voire sa passion à provoquer
les obstacle pour que plus tard on puisse chanter sa légende. C’est la voie du cheval lié.

alors que côté bushido, il me semble que le dépouillement est plutôt visé…

cette question peut être très approfondie et recoupe une contradiction apparente originelle…. infinie

A propos Jean-Baptiste Messier

J'ai toujours été guidé par l’idée de produire des textes originaux, provocateurs voire transgressifs. La littérature érotique est mon domaine de prédilection même si j'aime parfois composer des cocktails avec le fantastique, la SF ou la fantasy. J'écris aussi des chroniques sur des livres très divers et évoque parfois des sujets assez polémiques ou spirituels. A découvrir. ;)
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8 commentaires pour Y a t’il une antinomie entre le bushido et les mythes grecs ?

  1. Patricia dit :

    les argonautes n\’avaient ils pas un grand désir, celui de la toison d\’or > moi j\’appelle ça plutôt une convoitise d\’un symbole de pouvoir divin… le désir est-il ainsi lié uniquement à une personne, dans le désir de la posséder (au sens large !), ou s\’étend-il à l\’objet, dont on dit, selon l\’expression qu\’il est "de toutes les convoitises" ?pour le reste, il fallait oser faire le rapprochement entre le bushido, les héros de l\’Iliade et les samouraïs !pour revenir à quelque chose de plus passionnément terre à terre… j\’aime beaucoup les photos, et la coupe de cheveux est pile poil ! 😉

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  2. Jean-Baptiste dit :

    un désir peut il nous élever ?pour les cheveux, c\’est une tignasse bientôt ratiboisée 🙂

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  3. Patricia dit :

    si l\’on pose le principe qu\’un désir part d\’une envie/besoin de posséder, c\’est que cela sous entend un attachement à quelque chose que l\’on veut avoir ou obtenir. or, le but n\’est-il pas d\’atteindre justement ce stade de détachement ? le non-désir nous élève tandis que l\’attachement nous enracine au "bassement terrestre" au sens propre. ce désir en ce sens pourrait occulter toute possibilité de voir au-delà du visible, la conscience étant volontairement ou pas concentrée sur ce désir et non le détachement de l\’objet du désir. en résumé et pour faire court : non un désir ne peut pas nous élever ! surtout qu\’un désir inassouvi engendre la déception, elle-même causant peu ou prou la souffrance, et c\’est tout le contraire de ce qu\’enseigne radio bouddha ! 😉

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  4. Jean-Baptiste dit :

    si le but est de se détacher, c\’est que tu le désires ? :))j\’attends ta réponse 🙂

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  5. Patricia dit :

    évidemment, comment se détacher de quelque chose auquel on ne tient pas ou qu\’on ne désire pas ! sinon il n\’y aurait pas d\’effort et encore moins de souffrance. et comme on n\’a pas toujours ce que l\’on désire, aussi fort et ardent ou fou soit ce désir, on est obligé d\’en passer soit par la case résignation soit par la case déception. autre question : désir et détachement étant dans le principe contraires, à quel moment bascule-t-on de l\’un vers l\’autre ? quelle part l\’inconscient et la volonté ont-ils dans cette recherche d\’équilibre ?et toc !!!!

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  6. Jean-Baptiste dit :

    si tu désires ne pas désirer, tu te mords la "queue" :))…. en fait le contraire de désirer, c\’est rejeter, dédaigner, mépriser, ne pas supporter la présence de quelque chose, mais finalement même le contraire de désirer, témoigne d\’un lien à l\’objet, il me semble, non ?j\’envisage le détachement plus comme un élément neutre, si on dit désir en tant que moteur est symbolisé par un "+" et le rejet par un "-", on pourrait dire le détachement est l\’élément neutre qui témoigne que tu ne dépends pas de la présence ou non de l\’objet, ni joie extrême, ni tristesse extrême….il est humain de désirer, et si l\’on ne désire pas quelque chose, comment avancer ? ensuite il existe différentes sortes d\’objets du plus concret et palpable (ahhhhhhh bon je te laisse complèter :)) au objets abstraits la vertu, Dieu, la perfection que sais je encore ? bien sûr la relation sujet-objet peut s\’effacer, ne reste plus que la conscience, l\’absorption dans l\’instant….. sur ta question sur l\’équilibre inconscient et volonté, elle est très intéressante et témoigne de ta compréhension. En fait Aristote (ou Socrate ?) disait la "vertu est une habitude dictée par la raison". c\’est pareil pour le détachement, c\’est une habitude que tu cultives involontairement en faisant zazen, en laissant passer tes pensées, laisser passer nos pensées, nos émotions. Finalement qu\’est ce que c\’est ?sinon être détaché.en zazen tu cultives donc une habitude d\’esprit qui involontairement sans même que tu y penses t\’emmènes sur le chemin du détachement dans ta vie quotidienne.

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  7. Patricia dit :

    pour commencer si tu arrives à te mordre la queue, deux hypothèses : tu as été génétiquement modifié avec des éléments de l\’espèce canine, soit tu es plus souple que la moyenne… il y a bien une 3ème hypothèse mais ma bonne éducation m\’empêche de la mentionner ici… :-Dje ne suis pas d\’accord avec toi sur cette phrase : "le contraire de désirer, c\’est rejeter, dédaigner, mépriser, ne pas supporter la présence de quelque chose". ces termes-là sont empruntés à la notion d\’émotions à la limite sans maîtrise. d\’autant qu\’on peut ne pas supporter l\’absence de quelque chose aussi. je perçois plus le contraire du désir comme une indifférence. quelque chose qui se rapproche d\’un "dés-intérêt", d\’une "dés-affection", qui n\’apporte rien mais n\’enlève rien, qui ne représente rien et à laquelle on ne prête aucune attention. le relâchement total vis à vis de la pression extérieure, presque une inversion de la curiosité (la curiosité qu\’on dit naturelle est humaine aussi… dur combat !). le contraire de désirer, c\’est "activement" laisser passer l\’environnement comme on apprend à laisser passer les pensées en zazen. on ne l\’efface pas, on ne l\’occulte pas, on s\’y inclut comme on s\’insère dans un paysage mais sans prendre parti du décor. si on entre dans la dynamique du désir, on intègre la dimension de la renonciation en même temps.d\’où l\’utopie peut-être de vouloir atteindre (désirer atteindre !) un objectif qui n\’est pas humain justement parce que le désir est humain ! ce serait en pratique renoncer à une part de nous-même, spécificité de notre espèce ! quelle part de réalisme peut-on espérer conserver, quelle part de fantasme doit-on conserver ? je te rejoins par contre sur ta démonstration sur la base du + et du -. l\’idéal serait de trouver une sérénité médiane, comme une espèce de "désir platonique". celui que l\’on vit ou rêve, quelque soit l\’objet de ce désir (concret et palpable ou non 😮 ), sans qu\’il ne mène au renoncement et donc à la souffrance ou son pendant passionnel, l\’avidité !est-ce que finalement, plus que le désir, ce n\’est pas cet espoir entretenu d\’un fantasme utopique qui nous fait avancer chaque jour d\’un pas supplémentaire ?!oui, je sais, ce soir je suis en forme !

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  8. Jean-Baptiste dit :

    pour le contraire de désirer, c\’est pas moi qui le dit c\’est le dico 🙂 et bien sûr désirer comme être "insupporté par" ne se maîtrise pas, on ne choisit pas de désirer ou l\’inverse, c\’est une émotion. et bien sûr du fait qu\’on désire, on peut ne pas supporter l\’absence de quelque chose.donc être détaché, littéralement c\’est ne pas entretenir de liens, ne pas être ligoté… par l\’objet de nos…. désirs.le détachement n\’est pas une utopie mais une réalité que tu peux expérimenter, d\’où l\’intérêt.quoiqu\’il en soit l\’intérêt c\’est que tu te fasses tes propres idées ! :-)en tous cas ça t\’inspire… tant mieux !

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