Dimanche 8 Juin :
Après manger, Isabelle et moi, nous aimons lire le journal,
ensemble. Ça me fait du bien de sentir sa présence à côté de moi, son léger
parfum suave.
Je me suis toujours intéressé à la vie politique,
économique, sociale du pays. Je me rends compte avec le recul que je dois à mon
délabrement avancé, combien l’homme doit accumuler de connaissances qui
l’éloignent de l’essentiel.
Quel courage (mais n’est ce pas de la peur ?), faut il
à l’homme pour continuer de poursuivre ces chimères, que sont l’argent, la
gloire… ! quelle absurdité la vie !
Sans doute éprouvez vous quelque indulgence méprisante à
voir ainsi étaler, les états d’âme d’un vieillard égocentrique. Egocentrique…
ce qui est le propre d’un artiste. Mais c’est ce vertige à l’idée de la mort
qui me pousse à écrire… plus je me rapproche, plus je me ratatine, tel un vieux
journal qui se calcine.
La mort est telle, que je n’en viens à exister que par elle.
Lundi 9 juin :
Cet après-midi, je suis allé au Louvre. Le Louvre me plaît
non seulement en tant que musée, mais aussi en tant que trésor d’architecture.
Les touristes devraient lever le nez plus souvent, les plafonds peuvent être si
beaux !
Il est un tableau, que j’affectionne tout particulièrement,
la grande odalisque d’Ingres. Tandis qu’autour de moi, les touristes
poursuivent leur tumulte, je m’assieds tranquillement et m’imprègne de la
froide chaleur de ce nu si bizarrement sensuel. Je me repais de ce grain de
peau, cette carnation de pêche, de ces rondeurs voluptueuses. Cette femme est
femme et pourtant d’une beauté idéale… qui n’existera jamais. Une femme rêvée…
par un peintre vieillissant.
Mardi 10 juin :
Cet après-midi, j’ai invité mon fils, cet échalas nerveux et
maladroit. Il m’a parlé longuement et avec force de ses projets. J’admire comme
il déambule gaillardement entre les divers obstacles de la salle à manger, les
tables, les vases, les fauteuils, et soudain quand on le croit emporté par son
élan rageur, prêt à se cogner contre une chaise, comme il se maîtrise avec une
volonté… risible.
Je l’aime bien… Petit, il rêvait de découvrir le
monde : les USA, l’Italie… et l’Egypte ! l’Egypte le fascinait. Les
pharaons, les pyramides constituaient un monde légendaire régi par des dieux
inquiétants : Râ, Anubis, Isis, et Osiris… Maintenant, il a une situation.
Il s’est marié, a une petite fille, Sylvia, quatre ans à peine. Il vit
confortablement : il est clerc de notaire. Des liens se sont tissés autour
de lui.
Il a beaucoup parlé, de choses et d’autres comme on dit, de
sa voix qui se veut sûre, rassurante… peur de laisser filtrer les silences. Mon
fils, même s’il s’en défend, a toujours été conscient, d’une conscience parfois
maladive, des énigmes que posent la vie. De fait, il est peureux.
Il m’a quitté, je l’ai senti, avec un sentiment
d’insatisfaction et de honte… comme s’il s’était mal conduit.
gourmandise avide en partie rassasiée, une semaine de diète, que c\’est long ! j\’aime les détails qui émaillent un récit qui se veut sobre et épurée. ça attise la curiosité d\’un monde inconnu qui se refuse au lecteur, des questions que l\’on peut se poser dans la même situation, "et moi, que ferai-je à ce moment-là de ma vie ? si j\’y arrive !"…
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bientôt un mois de diète au moins car je vais partir en voyage !
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